Loin de l’attention des médias, le Tigré occidental est devenu le théâtre de crimes contre l’humanité. Les forces de sécurité régionales amhara et leurs alliés s’acharnent sur l’ethnie tigréenne. Homicides, viols, détentions massives et transferts forcés : la population subit une campagne implacable de nettoyage ethnique. Notre enquête menée en collaboration avec Human Rights Watch.
Depuis novembre 2020, les autorités et les forces de sécurité amhara mènent une campagne implacable de nettoyage ethnique pour chasser de chez eux les Tigréens du Tigré occidental avec l’assentiment et la possible participation des forces fédérales éthiopiennes. Pour ce faire, elles ont recours à des menaces, des homicides illégaux, des violences sexuelles, une utilisation massive de la détention arbitraire, des pillages, des transferts forcés et la privation d’aide humanitaire. Ces attaques généralisées et systématiques contre la population civile tigréenne constituent des des crimes de guerre ainsi que des crimes contre l’humanité.
Pendant les premières offensives de 2020, les forces fédérales éthiopiennes et leurs alliés ont perpétré des crimes de guerre contre la population tigréenne, en ayant recours notamment à des bombardements aveugles de villes et à des exécutions extrajudiciaires, forçant des dizaines de milliers de personnes à fuir au Soudan voisin et dans d’autres parties du Tigré.
Des milices tigréennes et des habitants de la région ont aussi commis des crimes de guerre contre des Amhara vivant sur place et des travailleurs migrants lors d’un massacre survenu dans la ville de Mai-Kadra, le 9 novembre 2020. Dans les mois qui ont suivi, les nouvelles autorités chargées d’administrer le Tigré occidental, associées aux Forces spéciales amhara ont entrepris une campagne de nettoyage ethnique contre les habitants tigréens de la région.
« Nous allons vous tuer. Partez d'ici. »
Les forces de sécurité amhara, des milices et les autorités nouvellement nommées mènent depuis fin 2020 une campagne coordonnée de persécutions fondées sur l’origine ethnique. Dans plusieurs villes du Tigré occidental, des pancartes ordonnant aux Tigréens de partir ont été affichées, et les autorités locales ont discuté de leurs projets visant à chasser la population tigréenne lors de réunions ouvertes au public.
Une femme tigréenne originaire de la ville de Baeker a raconté les menaces qu’elle avait subies de la part de membres d’une milice informelle amhara, les Fano : « Ils répétaient tous les soirs : “Nous allons vous tuer […] Partez d’ici”. » On a vu apparaître des tracts donnant aux membres de l’ethnie tigréenne 24 heures ou 72 heures pour partir sous peine d’être tués.